La « patrie des tombeaux » : les lieux funéraires à Rome, traces matérielles de la mémoire dans la littérature viatique (1770-1830)
Abstract
Dans Corinne ou l’Italie, Staël écrit à propos de Rome : « ici, les ruines, les déserts, les
palais inhabités laissent aux ombres un vaste espace. Rome maintenant n’est-elle pas la patrie des tombeaux ! » Elle développe un lieu commun qui apparaît dès la Renaissance dans les voyages d’Italie, mais auquel les romantiques donnent une nouvelle inflexion à partir du début du XIXe siècle : Rome est la patrie des tombeaux, à la fois parce qu’ils fleurissent dans sa campagne et ses rues, mais aussi parce que, déchue de sa grandeur antique, elle n’est plus
elle-même, par métonymie, qu’un vaste tombeau.
Néanmoins, dans la littérature de voyage des années 1770-1830, marquée par l’avènement d’une conscience patrimoniale moderne, ce n’est pas uniquement la dimension philosophique ou esthétique du tombeau qui fascine, mais aussi sa dimension matérielle, la trace mémorielle qu’il constitue : on observe ainsi la naissance d’un tourisme funèbre qui se manifeste par la mise en place d’un circuit de visite des tombeaux romains, mais aussi par l’intérêt nouveau des voyageurs pour les rites mortuaires, antiques, notamment à travers la trace archéologique, mais aussi ceux de la Rome moderne. À Rome, le tombeau sert donc de support à une mémoire éclatée, qui peut être antique ou moderne, païenne, chrétienne ou laïque.
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